Trop large, une définition du coaching-santé viendrait empiéter d’autres pratiques d’accompagnement, ce qui ne manquerait pas de susciter çà et là quelques hostilités. Trop réduite, une définition ne révèlerait pas l’intégralité des champs d’intervention du coaching santé. D’autant qu’il est probable, compte tenu de sa grande adaptabilité, que certains soient encore à découvrir.
Dans un premier mouvement, tentons de voir ce qu’il n’est pas. Le coaching-santé n’est pas de l’éducation thérapeutique.
La première définition officielle a été donnée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1998 : « L’éducation thérapeutique a pour but d’aider les patients à acquérir ou à maintenir des compétences qui leur seront nécessaires pour gérer au mieux leur vie dans le contexte d’une maladie chronique. L’éducation doit aussi permettre au malade et à sa famille de mieux collaborer avec les soignants. C’est un processus continu qui fait partie intégrante des soins médicaux, regroupant la sensibilisation, l’information, l’apprentissage et le support psychosocial, tous liés à la maladie et au traitement. »
Le coaching-santé n’est pas du disease-management. Celui-ci, né aux États-Unis dans les années 1990 dans un contexte de difficile accès aux soins pour tous, est le fait d’associations de patients, d’assureurs publics ou privés. « Le disease-management est un système coordonné d’interventions et de communication en matière de soins. Son action a pour objectif de soutenir les personnes malades et de les aider à maintenir ou améliorer leur qualité de vie. »
Maintenant que nous savons ce que n’est pas le coaching-santé, cernons son champ d’application. Dans son livre Un plaidoyer pour guérir, le docteur Claude Maylin préconise le coaching médical comme étant une prise en compte des besoins du patient par une action médicale, collégiale et personnalisée visant à humaniser la relation soignant-soigné. Comme le souligne très justement Claude Maylin, si le coaching-santé est médical, il n’est pas l’apanage des seuls médecins. Cela montre la nécessité de structurer le coaching-santé, notamment lorsque les acteurs du soin sont nombreux.
Il n’est pas rare qu’un patient soit pris en charge par une kyrielle d’intervenants. Cette balkanisation complique ostensiblement les rôles de chacun. Il importe donc d’organiser le coaching-santé du patient autant sur ses besoins de soins que sur sa demande de santé.
Le coaching-santé consiste à guider une personne ou un groupe de personnes dans ses aspirations au mieux être.
L’action du coaching-santé peut s’envisager dans le cadre de prévention ou dans la phase curative de la maladie. Il permet aux bénéficiaires de trouver les capacités à continuer à se projeter dans l’avenir en dépit d’événements traumatiques de vie. Aux moyens classiques à type de rencontres, de réunions, s’ajoutent des moyens modernes comme la vidéo conférence, le téléphone.
Le coaching-santé vise une autotransformation vers l’autonomie, autorisant la personne à adopter des attitudes favorables. Le coach-santé soutient la personne dans ses efforts de transformation en l’invitant à mobiliser tous les ressorts de son changement.
Parmi toutes ces offres, le coaching-santé présente quelques spécificités distinctives notables.
Dans le cadre d’une démarche préventive, la personne, sur sa propre initiative, peut entreprendre un coaching-santé. Sous réserve que le coach ait une formation solide et reconnue sur le thème de santé concerné, ce coaching-santé est tout à fait envisageable.
Si ce n’est pas le cas, la réserve devient éminemment majeure. Les dérives trop courantes invitent à la plus grande prudence, sans parler que les autoproclamations coach ne sont pas rares. Dans le doute, il est préférable de s’orienter vers d’autres professionnels de l’accompagnement, pour lesquels la question de la légitimité n’est pas remise en cause. La liste des bénéficiaires du coaching-santé préventif est impossible à dresser, parce qu’elle tient à la combinaison de plusieurs compétences chez le coach, par exemple, « diététicien-coach, addictologue-coach, psychologue-coach, etc. ».
Paradoxalement, dans le cadre d’une action curative, le coach-santé n’a pas besoin d’être qualifié sur la maladie du patient. La méconnaissance de la maladie lui permet de se centrer sur le sujet en souffrance. Naïf en médecine et expert en questionnement, « tous les efforts qu’il (le coach) fera pour comprendre comment le client se représente son problème seront autant d’opportunités pour le coaché de s’auto-informer ».
Le contrat tripartite est fréquent dans le monde de l’entreprise, entre un directeur des ressources humaines prescripteur, le coaché et le coach. Cette triangulation est transférable en coaching-santé. Selon le Dr Myriam « Pour que les malades puissent bénéficier de coaching, il apparaît nécessaire que les médecins en soient les prescripteurs. » Le fait que le médecin soit le prescripteur du coaching-santé présente plusieurs intérêts.
D’une part, il n’y a pas démédicalisation du suivi, ce qui garantit le bornage de l’intervention du coach, d’autre part, la parole du coaché est naturellement liée à sa capacité de résilience, particulièrement mise à mal dans les maladies chroniques ou au pronostic sombre.
Les cursus universitaires proposent depuis quelques années des cursus conjuguant ces deux volets.
Pratiquer le coaching-santé requiert de la part du coach deux types de compétences : une maîtrise totale du maniement des préceptes déontologiques et éthiques du métier de coach et des qualités personnelles liées au savoir-être relationnel. La première série est indispensa- ble. Elle représente la compétence qui permet de quali- fier le coach dans son rôle d’assistance. Elle est la garantie d’une formation technique solide. La seconde série est incontournable. À l’instar d’autres métiers de la relation d’aide, des compétences réduites à la technique ne sauraient suffire. Le coach-santé doit nécessairement être animé par des valeurs positives dans son rapport à l’autre, sans lesquelles le rôle d’assistance ne peut se déployer. Ces valeurs positives sont entre autres :
une écoute bienveillante, une acceptation inconditionnelle, le respect, la tempérance, la congruence, l’empathie, le respect de la distance.
La distance est très présente dans la relation d’être du coaching-santé. Distance entre le coach-santé et le coaché, distance physique, relationnelle, distance que parcourt le coaché entre le début et la fin du coaching- santé. Travailler la distance et travailler sur la distance, c’est savoir être là, près de l’autre, l’aider dans la durée à dépasser l’épreuve qu’il traverse. C’est aussi faire que les moments de rencontre soient des temps ressources et non des temps réponses toutes faites du rayon prêt-à-porter.
Il s’agit pour le coach-santé d’être le plus authentique possible, tout à la cause du coaché. Ni juge, ni modèle, il s’ingéniera à créer un lien affectif dans la plus grande tempérance du projet du coaché, qui n’est pas le sien et dans lequel il n’a pas besoin de se reconnaître. Et s’il venait à éprouver quelconque agacement, il veillera à métaboliser son ressenti en quelque chose d’utile à la relation.
Tout cela n’est rendu possible que si le coach-santé a travaillé sa conception de l’homme et a réalisé un travail sur soi.
Enfin, les métiers d’accompagnement sont éprouvants. Les dérives professionnelles imputables à l’érosion guettent tout coach santé. La supervision permet de les prévenir et garantit les bonnes pratiques professionnel- les. « L’étymologie de profession (du latin profiteri : déclarer) replace la notion de profession dans sa véritable fonction : donner à l’expert une capacité à avoir un discours sur sa pratique, être capable de construire une représentation consciente de son activité pour pouvoir la prendre comme objet à transformer. L’enjeu d’un processus de professionnalisation n’est pas tant les compétences telles qu’on peut les décrire d’un point de vue pédagogique […], mais plutôt les métacompétences : mobiliser sa mémoire, faire des choix stratégiques, vérifier, réguler son comportement etc. ».
Le coach- santé n’est en aucun cas là, en présence pour lui-même en tirer profit, pour satisfaire une curiosité perverse. Il doit adopter une attitude impérieusement oblative et non captative. N’oublions jamais que la personne coachée traverse une crise profonde, et est particulière- ment vulnérable à ce moment précis de vie. Plus qu’à tout autre moment, elle a besoin de sécurité. La confiance est un principe fondateur de cette sécurité.
Deux composantes doivent se conjuguer pour que s’instaure un climat de confiance : une relation de proximité pour autoriser une ouverture réciproque et une légitimité de compétences de la part du coach. La confiance n’est jamais acquise. Au fil des rencontres, elle se tisse, se donne, se partage. Elle s’instaure lentement, et peut se perdre rapidement, parce qu’elle est éminemment ancrée dans le subjectif. Elle s’entretient rencontre après rencontre. Et cela requiert de l’effort pour en être digne.